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Ce fait, m'embarquaj du costé du North en Escosse, comme dessus est dict, deliberant suyure ce conseil. Et parce que en passant, j'avois affaire es isles d'Orquenaj et Schetland, je y allaj, et n'y demeuraj que deux jours, mais je prins terre en Schetland, où je trouvaj quelques navires de Breme et Hambourg, et vouluz conuenir avecques les messieurs de navire de ce que je leur donnerois par mois, si longtemps qu'ils me serviroyent, car je ne pouvois en telle haste, et si pressé, me pourvoir de navires comme je desirois, si non de petits vaisseaux, tels que je peu lors recouvrer.
Les conditions que j'auois avecques le Bremois, nommé Girard Hemlin, estoyent telles : Que je luy debuois bailler par mois cinquante escus solides tant qu'il me seruiroit: et si, durant son dict seruice, son navire perissoit ou bien que je le voulusse retenir pour moy, je luy en debuois bailler XVI... thall, et pour son artillerie, cent escus sol. comme il apert par les contracts, qui en furent passez entre nous deux.1 Les mesmes condition debuoit aussi tenir celuy de Hambourg; mais quelques ungs de mes ennemys survindrent cependant que j'estois en terre au logis du recipueur, qui separerent mes navires, ainsi que je diraj.
Les seditieux cy dessus nommez avoyent assemblé quatre navires bien armés et equippés de gens de guerre et d'artillerie, desquels les chefs estoyent les susdits Sieurs de Grenge et Thillebairn, qui au point du jour entrerent en ung haure de la dicte isle qui s'apele Bresse Sund, là où y avoit quatre de mes vaisseaux; et comme les maistres de navire les apperceurent, mes Capp. et gens de guerre estans à terre, coupperent leurs cables et de leur batteaux, et se retirerent en ung aultre haure au North du dict pays qui se nommé Ounst.
Cependant leur principal navire, qui nous poursuyuoit, observoit diligentment celuy de mes vaisseaux qui estoit le plus tard de voile, le quel ils pourchasserent. Mon navire alloit devant, l'aultre apres. Mais il aduint que le navire des ennemis (qui poursuyuoit le mien qui n'aloit bien à la voile,) donna avecques le mien contre une roche couverte de la mer, de sorte que leurs [dict] navire, qui estoit le meilleur et leur servoit d'amyral, y demeura, mais le mien encores qu'il eust quelque dommaige se saulua. Quand j'entendis que mes ennemis vouloyent prendre terre pour poursuyure mes gens, je m'embarquay soubdain avecques eux au dict port de Ounst, là où mon intention n'estoit de demeurer, mais seulement de faire teste à mes dicts ennemeis, mais ces trois navires me surprindrent et presserent tellement (comme ils avoyent auparavant fait,) que je ne leur peu resister, ains fus contraint de fair voile et commanday à l'un de mes navires (dans le quel estoit le reste de ma vaiselle d'argent, acoustremens, et meubles, que j'auois emporté du chasteau de Edinbourg) de aller en ung haure nommé Schallowe, et là conuenir avecques les susdits Hambourgois, et l'amener apres moy, qui tenois la route de Dannemarck, auparavant resolu, aussi qu'il promit la reste de mes gens que j'auois laissé dans la dite isle. Les dites seditieux me poursuyuirent et presserent de telle façon, que fusmes au combat l'espace de trois heures, et en fin d'un coup de canon, couperent le grand mas du meilleur de mes nauires. Sur l'instant il se leua une telle tempeste du vent de sudevest, qu'il ne me fut possible de tenir ma dite route, et fus poussé sus la coste de Norvege, oùl il me falut reparer et renuitailler mes vaisseaux, qui pour mon partement si pressé n'estoyent pourueus comme il estoit necessaire.
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